Tunisie ou la politique spectacle à l’ ARP
Une Guerre d'usure et de position est lancée au sein de l'assemblée nationale tunisienne ou ARP ( Assemblee des représentants du peuple ), entre Abir Moussi, la dame de fer tunisienne et patronne du PDL (Parti Libre Destourien) et Rached Kherriji Ghanouchi gourou du mouvement islamiste Ennahda.<br /> La partie se joue ( a ce stade) en deux actes :
5 juin 2020 à 10h24 par Tarek Mami
Acte 1 : Abir Moussi ( parti destourien - 16 députés sur 217) depose, le 4mai dernier, une motion sur la non ingérence étrangère en Libye, qui dénonce « L’ingérence étrangère en Libye et la création d’une base logistique sur le territoire tunisien pour la faciliter
La motion recueille l’accord unanime des avis exprimés par les Depute sur ... son principe, mais rate la majorité requise, pour son adoption (109 voix), de 15 voix. Elle récolte 94 voix pour ! 68 contre ! avec une alliance de circonstance composée des partis Pdl, Tahya Tounes et le bloc de la reforme nationale. La Motion du Parti destourien s’apparente à l’histoire du verre à moitié plein ou à moitié vide .
Pour Abir Moussi c’est une grande victoire politique, malgré le rejet de sa motion et la défaite symbolique de son objectif : mettre en accusation publique le comportement de Rached Ghannouchi et sa « diplomatie parlementaire » en prenant directement contact avec le Président Turc Erdogan et le chef du gouvernement d’entente national Libyen, Faiez Sarraj, ce qui viole au vu des analystes tunisiens la constitution tunisienne , de 2014, et concurrence les attributions constitutionnelles du Président de la République Tunisienne.
Ce dernier a d’ailleurs, réagit en déclarant , lors de son allocution des vœux de l’Aid El Fitr, à la fin du Ramadan : « En Tunisie il n’y a qu’un seul Président ».
Abir Moussi cherche de fait à sanctionner sa mise en accusation publique de Ghannouchi par un vote parlementaire positif et faire ainsi vaciller Ghanouchi à la présidence de l ARP, avant de tenter de le faire tomber.
Pour Nahda le rejet de la motion de Abir Moussi constitue une victoire à la Pyrrhus. Cette dernière a réussie un premier coup politique, depuis l’installation de l’assemblée tunisienne dans sa nouvelle législature, en novembre 2019. La majorité élective de son président Rached Kherriji Ghannouchi, a la tête de l ARP, se rétrécit comme une peau de chagrin et fait passer son soutien politique de 123 à 68 voix .
Au final sur 217 députés, 94 votent pour la motion de Abir Moussi, 68 vote contre 7, s’abstiennent et 48 sont aux abonnés absents. Pour Abir Moussi ce n’est que partie remise. Car elle a compris, alors qu’elle est une député novice, car c’est son premier mandat, qu’à l’ARP il n’ya pas d’amis ou d’ennemis définitifs, mais des alliés de circonstance, qu’il faut aller chercher et séduire .
A l’ARP, amis un jour, ennemis le lendemain. Soit la politique de la vérité d’hier n’est pas celle d’aujourd’hui et celle d’aujourd’hui n’est pas celle de demain.
L’Acte 2 : à suivre et en préparation. Il s’agit d’une nouvelle motion de Abir Moussi qui vise, cette fois, ni plus ni moins que le retrait de la confiance accordée par 123 députés à Ghannouchi pour son élection à la tête de l’ARP. Et pour cette nouvelle motion à venir la barre fatidique reste toujours fixée à 109 voix.
Décidément la vie politique à l’assemblée tunisienne n’est pas un long fleuve tranquille. D’autant plus que l’idée de faire élire un président de l’ARP, tous les ans, au début de la session parlementaire, idée proposée, lors de la précédente législature, par le député du parti Ennahdha, et actuel président de son groupe au parlement, Noureddine Bhiri, fait son chemin.
Elle remettrait, si elle venait à se réaliser, les compteurs à zéro, au début de la prochaine session parlementaire, programmée en octobre 2020. Auquel cas au vu du tohu-bohu et de la « chakchouka » tunisienne toujours plus piquante, il y aurait peu de chance de voir Rached Kherriji Ghanouchi se faire réélire de nouveau à la tête de l’ARP.
Vidéo : Abir Moussi dans une intervention incendiaire, argumentée et bien documentée contre le Président de l'assemblée, Rached Ghannouchi