Palestine : Francois Hollande Clôt la parenthèse de la politique gaulliste au moyen orient
14 juillet 2014 à 15h47 par La rédaction
Tribune de Tarek Mami
La nouvelle opération de punition collective menée par l'armée israélienne, « Bordure protectrice », contre Gaza, a une conséquence directe et inattendue en France. La prononciation de l'acte de décès de la parenthèse gaulliste en matière de politique au moyen Orient et le retour à une vision plus classique de l gauche française, celle de la SFIO colonialiste.
En effet, Il parait bien loin le temps de la souveraineté nationale française instituée par le chef de la France libre, le Général De Gaulle qui déclarait en 1967 : « Maintenant, il (Israël) organise sur les territoires qu'il a pris l'occupation qui ne peut aller sans oppression, répression, expulsions, et il s'y manifeste contre lui une résistance, qu'à son tour il qualifie de terrorisme ».
Francois Hollande tourne ostensiblement le dos à cette position traditionnelle en écrivant dans un communiqué calamiteux publié sur le site de l'Elysée, le 9 juillet 2014, à 20 h 27 : « Le président de la République a eu ce soir un entretien téléphonique avec le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou. Il lui a exprimé la solidarité de la France face aux tirs de roquettes en provenance de Gaza. Il lui a rappelé que la France condamne fermement ces agressions. Il appartient au gouvernement israélien de prendre toutes les mesures pour protéger sa population face aux menaces. Le président de la République rappelle la nécessité de prévenir l'escalade des violences. »
Pas un mot pour les victimes principalement civiles, enfants en bas âge, personnes handicapées, femmes et hommes.
Ainsi la proximité implicite de François Hollande avec Israël et sa déclaration « d'amour pour Israel et pour ses dirigeants » (proclamée lors de sa visite officielle en novembre 2013), est devenue la politique officielle de la République française.
Ce faisant François Hollande renoue avec la pire tradition coloniale de la gauche socialiste française, depuis la SFIO de la IVe République. Il perpétue à sa manière la politique de Guy Mollet, de la livraison des éléments constituants de l'arme atomique à Israel, de l'agression tripartite contre le président nationaliste Gamal Abdenasser, et de la Bataille d'Alger.
De son coté, le site du ministère des affaires étrangères « déconseille, aux français, sauf raison impérative de se rendre dans un rayon de 40 km autour de la bande de Gaza », et précise qu'il « est impératif de se conformer aux instructions du commandement du Font intérieur israélien sur la conduite à suivre », comme pour eviter que des les victimes soient des personnes de nationalité française. Et tant pis pour celles de nationalité palestinienne.
Pour sa part, l'ambassadeur de France en Israel, Patrick Maisonnave, déclare fièrement entreprendre « une innovation » par l'organisation pour la première fois d'un « bal populaire » du 14 juillet pour célébrer la fête nationale ainsi que « l'amitié » entre la France et Israel. Et devant quelques protestations contre la tenue de cette initiative alors que des civils palestiniens meurent tous les jours sous les bombes de l'armée israélienne, l'ambassadeur persiste et signe. Il décide de « maintenir le bal » et de le ..... « dédier aux populations du sud d'Israël qui font face, depuis de nombreux jours, à des tirs de roquette extrêmement fréquents ».
Pour enfoncer le clou et pour s'adresser à tous ceux qui n'ont pas encore compris le message de soutien sans faille à l'agresseur israélien, contre le colonisé et agréssé palestinien, voilà que pointent les déclarations à l'emporte pièce du ministre de la défense Jean-Yves Le Drian. Ce dernier, confirme, de nouveau, le dimanche 13 juillet 2014, le parti pris de la France qui se range définitivement sur la ligne politique d Israël. Ce dernier « condamne le tir des roquettes contre Israël » mais ne condamne pas la pluie de missiles qui tombent sur Gaza. Du coup le ministre de la défense en perd son latin et sa maitrise de la langue française lorsqu'il demande a l'armée d'occupation sioniste « De faire en sorte que les victimes civiles soient épargnées ». Sa prose précise mérite d'être rapportée in extenso : «Nous condamnons les tirs de roquettes qui se sont produits de la part du Hamas sur la population civile israélienne mais nous demandons aussi à Israël de faire preuve de mesure dans sa riposte et en particulier de respecter le droit international et de faire en sorte que les victimes civiles soient épargnées». ( http://www.lefigaro.fr/international/2014/07/12/01003-20140712ARTFIG00132-gaza-l-onu-appelle-au-cessez-le-feu.php). Il oublie qu'en langue française quand il y a une victime, il est trop tard pour l'épargner.
Pourtant le résultat de ce match de l'horreur est, à ce jour de fête nationale française, 170 palestiniens assassinés et 1085 blessés contre Zéro mort côté israélien. Cela correspond probablement dans la bouche du ministre de la défense à la définition de la guerre propre.
Ces prises de position à répétition ne sont et ne peuvent être considérées comme des prémices d'une prise de position politique mais des éléments convergents qui dessinent une prise de position claire et sans ambiguïté en faveur de soutien totale et inconditionnel de la politique expansionniste, colonisatrice, raciste et discriminatoire de l'état d'Israël. On peut dire que le CRIF a réussi sa mission. C'est l'Etat français qui prend le relais de la défense de ses objectifs.
Le Neo conservatisme américain qui a fait tant de mal, principalement au Moyen Orient, et ouvert la boite à pandore qui prépare le choc des civilisations préconisé par Samuel Huntington et la future « guerre de cent ans » théorisée par Henry Kissinger, et qui semble disparaître, pour un temps, derrière un rideau avant sa prochaine résurrection a traversé l'Atlantique et élit domicile en France, puisque le président Barack Obama, publie de son coté une tribune dans le quotidien israélien Haaretz, appelant l'armée israélienne à la retenue lorsque François Hollande publie sur le site de la présidence un communiqué de « permis de tuer ».
En France, Ni Francois Mitterrand ni même le néo-conservateur en titre Nicolas Sarkozy n'ont osé aller aussi loin que Francois Hollande. Le premier a eu le courage, de demander lors de son discours à la Knesset -l'assemblée nationale israélienne - la création d'un Etat palestinien viable. Le deuxième a eu le courage de qualifier Gaza de « la plus grande prison à ciel ouvert dans le monde »
La prise de position de François Hollande nie le caractère essentiellement colonial du conflit israélo-palestinien et les paroles prothétiques de son lointain prédécesseur fondateur de la 5ème République qui, a eu, lui, le courage de mettre fin à la colonisation de l'Algérie au bout de 130 ans d'occupation,en passant par la case la paix des braves comme aimait à le répéter le leader palestinien Yasser Arafat.
Ce communiqué de l'Elysée constitue une faute politique avérée et explique probablement la non abrogation des circulaires anti-actions de boycot- de la Ministre UMP Alliot - Marie qui ordonnent aux procureurs de la République de poursuivre systématiquement les acteurs actifs du Boycott des produits israéliens. Ces développements politiques engagés par le président français et par son gouvernement appellent des sanctions politiques et des prochains votes en conscience.
Lorsqu'un citoyen n'est pas d'accord avec la politique de son gouvernement, il a la possibilité, le droit et le devoir de la dénoncer lorsqu'elle est en cours et de la sanctionner lorsque les échéances électorales arrivent, en mettant en accord sa dénonciation et sa conscience, en mettant dans l'urne le bulletin qui sanctionne le sortant. La démocratie ne consiste pas seulement à élire des maires, des parlementaires et un Président de la République aux échéances fixées par la constitution. La démocratie c'est aussi approuver et/ou contester en conscience les choix adoptés par les élus, faire vivre au quotidien la citoyénnété et les valeurs de la République et en tirer toutes les conséquences lors de l'échéance suivante. A défaut, la résignation et l'indifférence face aux prises de décisions politiques finiront par ébranler les fondements même de la démocratie et le sens de la constitution. Pour tout cela les citoyens ne peuvent compter que sur eux eux même, être leur propre capitaine, surtout lorsqu'ils sont dépourvus de lobbys forts, puissants et tentaculaires, comme c'est malheureusement le cas de la communauté franco-maghrébine, forte quantitativement, faible qualitativement en terme d'influence.
Tarek MAMI
Président de France Maghreb 2