Ni le poids des ans ni le tragique de l’histoire n’ont, semble-t-il, entamé l’optimisme de ce colosse à la voix douce qui vient tout juste de prendre ses fonctions d’ambassadeur de Palestine en France. Salman El Herfi le dit et le redit : « Ils finiront par partir. » « Ils », évidemment, ce sont les colons qui occupent la Cisjordanie. Malgré les plans d’occupation qui se multiplient et le mur qui serpente profondément à l’intérieur du territoire palestinien, malgré la répression, le nouvel ambassadeur en est convaincu : « L’option de deux États est toujours valable parce que la paix n’est pas seulement une nécessité pour les Palestiniens, elle l’est aussi pour les Israéliens. » « D’ailleurs, argumente-t-il, les jeunes Israéliens ne voudront pas appartenir à un pays qui pratique un système d’apartheid. »
Cette conviction chevillée au corps, il la tient de son histoire personnelle. « Très tôt, dit-il, j’ai ouvert les yeux sur la situation. » Il a hérité cette conscience précoce d’un père engagé dans le mouvement national palestinien. Sa famille, d’origine modeste, était de Beer-Sheva, grande ville aujourd’hui israélienne plantée au milieu du désert du Néguev, où Salman El Herfi est né en 1944. Une terre de bergers palestiniens. Ce qui lui a longtemps valu d’être surnommé « le Bédouin », comme le confie l’une de ses amies. Il a tout vu, tout vécu, du déracinement et de l’exil. Sa vie de précarité et d’inconfort est comme un livre d’histoire. Il la raconte sans se faire prier, conscient sans doute que le récit fait partie du combat politique. La famille est d’abord expédiée à Gaza, puis à Hébron, en Cisjordanie. Un souvenir douloureux : « Nous vivions dans des grottes. » Avant d’ajouter, pensif : « Je n’ai pas eu d’enfance. » Il ira ensuite faire ses études en Algérie, puis en Jordanie, où il passe son bac. Avant de reprendre le chemin d’Alger. « Un pays qui a eu une grande importance pour moi. Au moment de la révolution algérienne [l’indépendance de 1962, NDLR], on se disait : ce qu’ils ont réussi, nous pouvons le réussir, nous aussi. »
À Paris après Mai 68
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